L’art poétique de l’entomologiste : quand la collection raconte une histoire

Le langage secret des anciens : un lexique pour la classification

Nommer, c’est révéler. les noms latins et grecs des insectes sont de véritables poèmes décrivant leur nature. On peut donc organiser les insectes par attributs spectaculaires:

  • la couleur et l’éclat : des spécimens portent des noms évoquant directement leur teinte :
    • jaune/fauve (latin: fulvus , flavus ) comme rhagonycha fulva.
    • vert (viridis ), ou vert poireau (πρασών / prason ), comme tettigonia viridissima ou palomena prasina.
    • bleu/ciel (caerulus) comme oedipoda caerulescens.
    • noir/sombre (ater ) ou (μελας / melas ) comme dermestes ater.
    • brillant/doré (nitidus , auratus ) ou χρυσος / chrysos (or ) comme cetonia aurata ou antaxia nitidula.
    • rouge/pourpre (purpureus) comme carpocoris purpureipennis.
  • les caractéristiques morphologiques remarquables : l’étymologie met en lumière les traits les plus singuliers de l’insecte :
    • la tête (κηφαλη / képhalé ) pour perlodes microcephala.
    • la corne (κερας / kéras ) pour ceraleptus gracilicornis (aux cornes fines ).
    • la queue (cauda ) pour polysarcus denticauda (queue en forme de dent, dens ).
    • la plume (penna ) pour ptilophora plumigera (porte-plume ).

La carte du monde dans les noms

l’origine géographique est une autre clé de lecture. Certains noms d’espèces portent l’empreinte de leur lieu de découverte ou de leur répartition principale :

  • graphosoma italicum : vient d’italie.
  • polistes gallicus : provient de la gaule (france).
  • vespula germanica : originaire d’allemagne.
  • blatta orientalis : vient de l’orient (moyen-orient / asie).
  • dermestes peruvianus : originaire du pérou.

Le biotope : un récit de vie et d’habitat

La classification par biotope permet de raconter l’histoire de la vie de l’insecte. Le simple fait de les distribuer par lieu de vie offre une nouvelle perspective sur l’écologie :

  • zones humides/marais (palus ) : gerris lacustris , tipula paludosa.
  • forêts/campagne : ectobius sylvestris (forêts ), cantharis rustica (campagne ).
  • plantes : macrosiphum rosae , vanessa cardui (carduus = chardon ).

L’anthropomorphisme et les mystères de la durée

Enfin, les insectes se prêtent à un jeu d’analogie avec l’humain et le temps.

  • analogies humaines : les noms d’espèces peuvent évoquer des figures humaines :
    • lestes sponsa (épouse/fiancée ) et pyrrhosoma nymphula (nymphe/fiancée, du grec νυμφα / nympha ) sont comparées à une jeune fille.
  • l’éphémère : l’espèce vivant un seul jour est bien ephemera vulgata , dont le nom dérive du grec ήμερα / héméra(jour ), illustrant la brièveté de son existence.