
Le nouveau programme de français au cycle 4 (2025) : entre exigence et recentrage
Le Conseil Supérieur des Programmes a publié au printemps 2025 un projet de refonte du programme de français pour le cycle 4. Ambitieux, rigoureux, ce texte vise à redonner cohérence, exigence et profondeur à l’enseignement du français au collège. Mais derrière ses promesses structurantes, plusieurs tensions émergent, notamment sur la liberté pédagogique, la place de la littérature contemporaine et les pratiques différenciées.
Les qualités du nouveau programme
1. Une architecture claire et cohérente
Le nouveau programme propose une progression annuelle par niveau, guidée par une perspective structurante :
- 5e : Éprouver, expérimenter,
- 4e : Rêver, délibérer,
- 3e : S’affirmer, s’émanciper.
Chaque année articule plusieurs entrées thématiques associées à des genres précis (roman, poésie, théâtre, littérature d’idées). Cette organisation offre une lisibilité bienvenue pour les équipes pédagogiques.
2. Un recentrage sur les grandes œuvres du patrimoine
Le texte assume pleinement un réancrage dans les œuvres intégrales majeures, avec un corpus d’auteurs classiques (Chrétien de Troyes, Shakespeare, Hugo, Zola…) et une exigence qualitative dans les traductions. Cela vise à offrir à chaque élève une culture commune et solide, fondée sur une tradition littéraire exigeante.
3. Des attendus précis, des objectifs par niveau
L’enseignement de la grammaire, du vocabulaire, de l’oral et de l’écriture est structuré selon des objectifs explicitespour chaque niveau. L’élève est progressivement amené à développer des compétences complexes (réécriture, mise en voix, écrits réflexifs, interprétation argumentée).
4. Une valorisation de l’écriture créative et de l’oral
Le programme accorde une place importante à la création : jeux de voix, parodies, carnets de lecture, capsules audio, récitations… L’écriture n’est plus seulement scolaire, elle devient un levier d’émancipation et d’expression de soi.
Les limites et points de vigilance
1. Une liberté pédagogique réduite
La structuration annuelle et les listes d’œuvres proposées risquent de rigidifier les progressions et de réduire l’autonomie des équipes. Certains enseignants déplorent déjà un manque de souplesse, notamment pour adapter les contenus à des classes hétérogènes.
2. Un corpus patrimonial très dense, au détriment de la littérature jeunesse
Si l’ambition culturelle est louable, la part accordée aux littératures de jeunesse, aux voix contemporaines et aux œuvres issues des minorités culturelles reste marginale. L’élève peut y perdre des occasions d’identification et de plaisir de lecture.
3. Une complexité qui pourrait fragiliser les élèves les plus en difficulté
La montée en exigence (lecture d’œuvres longues, récitation fréquente, vocabulaire soutenu, rédaction réflexive) pourrait accentuer les écarts entre les élèves. La différenciation pédagogique est évoquée, mais peu outillée.
4. L’absence d’interdisciplinarité (fin des EPI ?)
Alors que les programmes de 2016 insistaient sur les enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI), le nouveau texte n’en fait pas mention. Cela pourrait être interprété comme un recul de la pédagogie de projet et du lien entre disciplines.
Une réforme ambitieuse… à surveiller de près
Ce nouveau programme marque une inflexion nette vers un enseignement plus structuré, plus exigeant et plus littéraire. Il porte une ambition forte : transmettre un socle de culture, structurer le goût de lire, réhabiliter l’étude des textes.
Mais cette ambition devra être accompagnée de moyens concrets :
- formations pour les enseignants (notamment sur les lectures à voix haute, la mise en scène, l’interprétation) ;
- outils pour la différenciation pédagogique ;
- ressources accessibles pour mettre en œuvre ces textes dans la diversité des classes.
Nous verrons bien ce qui nous sera proposé.
Ce projet invite à repenser le sens profond de notre enseignement : former non seulement des lecteurs, mais des citoyens sensibles, critiques et engagés.
Le nouveau programme ;
Mon comparatif ;
J’ai mis des cases en gris clair pour le niveau cinquième, en gris plus foncé pour le niveau quatrième et en gris foncé pour le niveau troisième. Cela permet, je trouve, de mieux voir la progression au cours du cycle 4.
Le programme de vocabulaire et orthographe lexicale ;
Le programme de grammaire ;
Le programme de lecture ;
Le programme de culture littéraire et artistique ;